Herdiers: un peu d’histoire
Herdier : pâtre communal s’occupant du troupeau de bétail (vaches, bœufs, moutons, chèvres, porcs, chevaux), souvent gardé en commun sur les pâtures communales, les jachères, les bords de chemins, les landes, les taillis ou les bois…
De nos jours…
Les exploitations extensives sont très différentes les unes des autres, mais si on veut se faire une idée de l’exploitation type, voici comment elle se compose (tout en gardant en tête l’extrême diversité de la réalité).
Elle occupe 2 personnes à temps plein et a été créée il y a une quinzaine d’années. Elle a une superficie de 80 ha dont 45 ha en haute valeur biologique : des prairies humides et des mégaphorbiaie de fond de vallée, des prés de fauches, des tourbières et landes tourbeuses, des pelouses calcicoles… Au niveau foncier, 18 ha sont propriété de l’exploitation, 12 ha sont loués et 48 ha sont mis à disposition (RW, asbl, commune…). Elle est généralement à l’étroit et recherche des pâtures ou des prés de fauche pour nourrir le bétail l’hiver en dehors des zones à haute valeur biologique. Les exploitants sont souvent des passionnés de nature et ils participent au suivi d’espèces indicatrices ou rares (plantes, papillons…).
Le cheptel est composé en moyenne de :
50 bovins (principalement vache Highland Cattle et Galloway)
4 équins (principalement poney Fjord et âne)
105 ovins et caprins (principalement mouton Roux ardennais)
Le bétail est élevé pour la viande, la sélection de reproducteurs et la gestion de sites naturels (débroussailleurs). La production est vendue en vente directe, locale et en circuit court. L’exploitation tente de se diversifier : activité pédagogique ou touristique, vergers et maraîchage, bois de chauffage… La survie de l’exploitation serait impossible sans les aides financières de la Région wallonne et de l’Europe (PAC & MAE).
Pourquoi faire pâturer des milieux naturels ?
En Wallonie, les espèces des milieux ouverts (prairies, landes, pelouses calcicoles…) sont particulièrement menacées soit par l’intensification des pratiques agricoles (fauchages trop fréquents, pâturage trop intense), soit par leur abandon (sol trop rocailleux, trop marécageux, trop pentu). A titre d’exemple la moitié des espèces de papillons en Wallonie sont menacées ou éteintes !
L’effet de l’intensification est évident : actuellement beaucoup de plantes n’ont plus le temps de faire leur cycle « fleur-fruit-graine » entre deux fauchages ou deux entrées de troupeau et elles disparaissent rapidement, entraînant les insectes (papillons) liés à ces plantes, ainsi que les prédateurs (oiseaux) consommant ces insectes. Ce phénomène est aussi présent en agriculture biologique ! Quant aux engrais et pesticides, leur effet nocif pour la biodiversité n’est plus à démontrer…
L’abandon est plus pernicieux, les plantes dominantes vont s’installer rapidement en absence de pâturage ou de fauchage, et étouffer les plantes plus petites ou empêcher la germination des graines à cause de l’herbe sèche qui s’accumule au sol chaque hiver. Dans un second temps ce sont les broussailles et les arbres qui s’installent et donnent le coup de grâce aux plantes basses par leur ombrage.
Si nous voulons conserver les orchidées, papillons, lézards ou autres oiseaux des milieux ouverts, il faut donc maintenir une activité agricole sur les zones les plus intéressantes qui, le plus souvent, sont jugées peu rentables par l’agriculture conventionnelle. Mais cette activité agricole doit être raisonnable et compatible avec la conservation de la nature : fauchage tardif et pas trop ras, pâturage à faible charge en fin de saison, races primitives peu sélectives dans le choix des plantes consommées, pas de vermifuge pour le bétail… Il s’agit de recréer le service de pâturage qu’assumaient jadis les aurochs, bisons, tarpans et autres élans qui peuplaient nos régions jusqu’au VIIIème siècle, repris ensuite par les itinéraires des herdiers.
Le pâturage extensif, ce n’est pas que « sauver les papillons », mais il engendre aussi de nombreuses retombées intéressantes :
- création d’emploi avec des exploitations généralement plus rentables qu’en conventionnel sur ce genre de terrain ;
- élevage d’animaux avec un impact environnemental positif ;
- production de viande et de produits laitiers à haute valeur organoleptique ;
- entretien des paysages, amélioration du cadre de vie des habitants et de l’attrait touristique ;
- mise à disposition de sites diversifiés pour l’animation, la formation et la recherche ;
- limitation du risque d’incendie en empêchant l’embroussaillement et l’accumulation de biomasse sèche au sol.